Portabilité du CPF : bonne ou mauvaise idée ?

01/11/2022 Formations/Examens
Formations/Examens Portabilité du CPF : bonne ou mauvaise idée ?

Pour financer la formation au permis de leurs enfants, Mobilians-ESR souhaite que les parents puissent utiliser leur Compte Personnel de Formation (CPF). Une idée qui ne fait pas l’unanimité dans la profession.

La baisse du pouvoir d’achat des Français n’aura échappé à personne. Or pour les familles, financer la formation au permis de conduire de leurs enfants est de plus en plus problématique. Partant de ce constat, Mobilians-ESR milite depuis plus d’un an en faveur de la portabilité du CPF. Autrement dit pour que les parents puissent financer le permis de leurs enfants avec leur CFP. « De plus en plus de parlementaires sont intéressés par notre proposition », affirme Patrice Bessone, président de Mobilians-ESR. « Nous sommes hyper confiants pour qu’elle soit adoptée dans la prochaine loi sur la formation professionnelle. L’État est exsangue, les collectivités ne veulent plus investir dans le permis et les entreprises crient à corps perdu qu’elles recherchent des employés titulaires du permis. Cette solution résoudrait tous les problèmes. »
L’UNIC, par la voix de sa présidente Sandra Carasco, est sur la même longueur d’ondes. « Nous y sommes favorables y compris pour les conduites accompagnées dès 15 ans car cela entraînerait un développement de cet apprentissage dans les auto-écoles. » Selon Sandra Carasco, « ce ne serait pas dévoyer l’objectif du CPF dans la mesure où les parents qui ont eu leur permis il y a longtemps se forment aussi en même temps que leurs enfants. J’y vois donc un intérêt pour tout le monde ».

Des doutes sur la faisabilité
Même approche positive pour Michel Goepp, président de Club Rousseau, avec néanmoins quelques réserves. « Tout ce qui facilite l’accès au permis de conduire pour les jeunes est une bonne idée. De plus, une majorité de parents n’utilise pas leur CPF. Si cette proposition est adoptée, nous applaudirons des deux mains. » Mais Michel Goepp ne cache pas son scepticisme. « Des fonctionnaires sont réticents à cette idée puisque le CPF est destiné à la formation personnelle. De ce fait, ils considèrent qu’il n’y a pas de raison à ce que le CPF soit utilisé à d’autres fins. » Quant au système de rétrocession imaginé par Mobilians-ESR, Michel Goepp est plus que dubitatif. « Je ne sais pas comment ni s’il sera possible que les enfants rétrocèdent leurs droits de formation aux parents une fois qu’ils auront trouvé un travail ». CER et ECF formellement opposés Pour leur part, les réseaux CER et ECF sont formellement opposés à cette proposition. « Comme son nom l’indique, l’usage du compte personnel de formation est personnel et doit s’inscrire dans un parcours professionnel. Par conséquent, la portabilité vers un élève de 15 ans n’a pas de sens », rappelle Patrick Crespo, président de CER. Lequel souligne que « ce sont les entreprises qui financent le CPF pour leurs salariés, pas pour leurs enfants ». Une position qui vaut à Patrick Crespo de se mettre à dos une partie de ses adhérents. « Ils ne comprennent pas et pensent que la portabilité pourrait générer de l’activité supplémentaire. On ne peut pas faire n’importe quoi, surtout qu’il existe d’autres financements. » De son côté, le président d’ECF, Bruno Garancher, redoute que cette demande de portabilité ait pour conséquence une exclusion « pure et simple » du permis de ce dispositif de financement. « À tout demander, on finit par tout perdre », assène-t-il. « Le financement du permis B par le CPF est très largement remis en cause par les organisations syndicales telles que FO, mais aussi par la Cour des comptes. » Lui aussi rappelle que le CPF est un droit attaché à une personne. « La portabilité du CPF des parents vers les enfants constituerait donc une faute politique et une erreur de compréhension des objectifs de ce dispositif car cela revient à spolier les personnes de leurs droits individuels de formation. » Néanmoins, les représentants d’ECF et de CER ne nient pas les difficultés de financement du permis. D’autant que l’accès aux différents dispositifs - quand ils sont identifiés - est souvent complexes. « Il faudrait améliorer l’information à ce sujet », propose Michel Goepp. Même constat pour Sandra Carasco. « Les élèves et les écoles de conduite ne sont pas suffisamment informés sur les possibilités de financement ». Bruno Garancher invite pour sa part les pouvoirs publics et les professionnels à entamer une réflexion de fond pour sécuriser le financement de la formation. « L’avenir est là : pas dans le détournement d’un outil visant à favoriser la formation des salariés ».

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