Formations au permis via le CPF : quand peut-on appliquer l’exonération de la TVA ?
01/02/2025 Formations/Examens
Beaucoup d’auto-écoles, pensant être dans leur bon droit, facturent sans TVA les formations au permis de conduire financées par le Compte personnel de formation (CPF). Malheureusement, les services fiscaux viennent de remettre en cause cette pratique.
En tant que personne morale vendant à titre habituel des prestations de services, l’auto-école est assujettie à TVA. Elle est donc tenue de reverser 20 % du prix de vente de ses formations aux services des impôts. Cependant, depuis que les formations aux permis de conduire sont devenues éligibles au CPF, les auto-écoles ont entrevu la possibilité de se prévaloir des dispositions de l’article 261-4 4° a du Code général des Impôts (CGI) permettant une exonération de TVA pour les prestations de services réalisées dans le cadre de la formation professionnelle continue (FPC). Revenons rapidement sur cette possibilité, ses conditions et sa récente évolution.
L’admission à l’exonération
Pour être finançable par le CPF, la formation au permis de conduire doit s’inscrire dans un projet professionnel et/ou participer à la sécurisation d’un parcours professionnel. Dit autrement, cette formation doit être réalisée dans un objectif professionnel, celui d’accéder plus facilement à l’emploi ou de prendre un nouvel emploi. Compte tenu de ces modalités et aussi de ce que prévoit le Code du travail, les écoles de conduite ont estimé pouvoir revendiquer le statut de dispensateur de FPC et donc bénéficier d’une exonération de TVA en application de l’article 261 du CGI précité. En particulier, les auto-écoles peuvent mettre en avant l’effet combiné des articles L. 6311-1 et L.6312-1 du Code du travail traitant de la FCP et de son financement par le CPF, pour faire valoir que la formation au permis de conduire, financée par le CPF, relève de la formation professionnelle continue, soit une prestation pouvant être exonérée de TVA.
Les démarches à entreprendre
Attention, la mobilisation du CPF pour la formation du permis de conduire ne suffit pas. Pour pouvoir commercialiser des formations exonérées de TVA,
l’auto-école doit d’abord se faire admettre comme organisme de formation et obtenir incidemment le droit à exonération de TVA. Concrètement, l’école de conduite complète et adresse le formulaire CERFA n°3511 à la DREETS (direction du travail). Si la DREETS reçoit la demande de l’auto-école et reconnaît qu’elle délivre des formations s’inscrivant dans le cadre de la FPC, elle lui octroie un numéro dit NA (numéro d’activité) valant accord d’exonération de TVA pour toutes les formations liées à la FPC.
Le rescrit de juillet 2024
Avec le financement possible des permis au moyen du CPF beaucoup d’auto-écoles ont effectué cette démarche auprès de la DREETS et ensuite facturé sans TVA les formations délivrées. Malheureusement, depuis juillet 2024, cette pratique est remise en question. Dans un rescrit publié le 24 juillet 2024, l’Administration fiscale, s’appuyant sur une décision de la Cour de justice de l’Union européenne du 14 mars 2019 ayant jugé que « seuls les enseignements dispensés en vue de l’apprentissage d’un métier peuvent être considérés comme relevant de la formation professionnelle et ainsi bénéficier de l’exonération de TVA », a exclu l’exonération de TVA pour les formations aux permis B. L’Administration fiscale précise qu’un tel permis servant aussi dans la vie privée, il n’est pas purement professionnel et ne peut donc bénéficier d’une exonération de TVA. Cette solution est étendue à tous les permis A, B et aussi aux cours de conduite reçus par les personnes souhaitant devenir chauffeurs de taxi, VRP, VTC. En réalité, seules les formations du groupe lourd (C – sauf C1 - et D) et suivies pour la conduite de poids lourds, cars, autobus peuvent encore être exonérées de TVA.
Les conséquences sur les prestations déjà facturées
Si vous avez facturé des formations HT avant cette décision, pas de panique, puisqu’un rescrit n’a pas d’effet rétroactif. Ce qui veut donc dire que normalement aucun redressement ne sera possible pour les formations estimées, en l’état du droit positif, comme liées à la FPC et donc facturées sans TVA avant le 24 juillet. Cette solution ressort notamment d’un avis du Conseil d’État du 10 mars 2020. Dans cette décision, il est rappelé que la délivrance du NA qui entraîne reconnaissance du droit à exonération de TVA, présente, pour le bénéficiaire, le caractère d’une décision créatrice de droits que l’Administration ne peut remettre en cause -sauf en cas de fraude- que pour l’avenir.
Véronique Viot, Avocate au barreau de Paris