Un titre professionnel va remplacer le Bepecaser

01/09/2014 Réglementation
Réglementation Un titre professionnel va remplacer le Bepecaser En préparation depuis plusieurs années, la réforme du Bepecaser a finalement débouché sur la création d’un titre professionnel qui devrait prendre la relève en 2016.

La réforme du Bepecaser, c’est un peu l’Arlésienne. Tout le monde en parle depuis des lustres sans jamais rien voir venir. En réalité, l’inertie n’est qu’apparente. Dans les coulisses, les organisations professionnelles (CNPA-ER et UNIDEC) enchaînent depuis quatre ans les réunions avec le gouvernement et des organismes comme l’Association nationale pour la formation professionnelle des adultes (AFPA) et l’Association nationale pour la formation automobile (ANFA) pour faire avancer le dossier. Et bonne nouvelle : le dossier est sur le point d’aboutir. Le Bepecaser n’a plus que quelques mois à vivre avant de faire place à un titre professionnel.

La genèse d’une réforme
La genèse de ce projet remonte à 2009. Le 13 janvier, François Fillion, alors Premier ministre, dévoile une réforme du permis de conduire en 15 points. La mesure n°15 intitulée « Améliorer la qualité du système de formation au permis » prévoit notamment de « mettre en place un diplôme d’enseignant à la conduite certifié au-delà du seul ministère des Transports ». Par ailleurs, la réforme insiste sur la nécessité de développer des qualifications complémentaires au diplôme pour permettre d’assurer des formations spécifiques telles que le post-permis, la conduite sur neige ou glace, la formation auprès d’un public présentant un handicap, etc.).

Le choix d’un titre professionnel et non d’un diplôme
De leur côté, les représentants de la profession ne sont pas contre le fait de revoir toute la filière professionnelle. En revanche, ils rejettent l’idée d’élaborer un nouveau diplôme géré par le ministère de l’Éducation nationale comme le souhaitait le gouvernement d’alors. D’où l’idée de s’orienter non pas vers un diplôme géré par l’État qui sanctionne un parcours d’étude, mais vers la création d’un titre professionnel qui s’attache plus à la fonction qu’il permet d’occuper et qui est contrôlé par la profession elle-même. « Le titre professionnel permet à la profession de garder la main sur ses propres diplômes car seul un accord de branche peut défaire un accord de branche, explique Alain Catala, membre du directoire de l’UNIDEC et référent pour les Bepecaser et BAFM. Une loi ne peut modifier un accord de branche ». Encore faut-il obtenir un accord de branche. Pour cela, le CNPA-ER et l’UNIDEC travaillent avec l’Association nationale pour la formation automobile (ANFA) et obtiennent le fameux sésame en 2010. Cette première étape validée, le nouveau titre professionnel baptisé « Enseignant de la conduite et de la sécurité routière » (de niveau bac + 2 et non plus bac comme le Bepecaser) est décrit dans un Référentiel emploi activités compétences (REAC) et un référentiel de certification en 2011. Restait alors à définir les modalités de validation du titre avec l’Association nationale pour la formation professionnelle des adultes (AFPA).

Le contenu de la formation
Pour obtenir le titre professionnel « Enseignant de la conduite et de la sécurité routière » (ECSR), il faudra suivre une formation dans un centre de formation agréé. À noter que tous les centres de formations agréés pour le Bepecaser pourront former au titre professionnel ECSR. La durée de la formation est portée à 910 heures minimum. Mais elle pourra être allongée si nécessaire ou, au contraire, raccourcie au cas où le stagiaire présente une expérience professionnelle qui le dispense de passer certaines compétences. Cette formation se décompose en deux parties permettant d’obtenir un certificat de compétence professionnelle (CCP). Le CCP1 porte sur la formation initiale à la conduite. « Cela reprend le programme de l’actuel Bepecaser, explique Michel Schipman, vice-président du CNPA-ER. Et sont ajoutées de nouvelles thématiques telles que l’animation de groupe, l’approche psychologique et comportementale, la prise en compte des personnes autres que l’élève comme les parents lors des rendez-vous pédagogiques, etc. ». « On travaille par compétences qui viennent compléter la formation par objectifs, souligne Alain Catala. On reste dans l’idée du REMC, lui-même inspiré de la matrice GDE ». Quant au CCP2, il porte sur les formations pré-permis et post-permis. L’élève pourra passer ses deux CCP dans l’ordre qu’il souhaite. Mais il devra impérativement avoir validé un CCP pour pouvoir passer le second. Le 1er CCP obtenu, celui-ci aura une durée de validité de 2 ans. En d’autres termes, les stagiaires disposeront de deux ans pour obtenir leur 2e CCP une fois le 1er obtenu. Dans le cas contraire, ils devront tout reprendre à zéro. À l’instar du Bepecaser, il sera possible de suivre une formation spécifique de 210 heures pour l’obtention du certificat complémentaire de spécialisation des « deux-roues motorisés » et de 245 heures pour obtenir le certificat complémentaire de spécialisation du « groupe lourd ».

Deux filières de formation possibles
Une personne désirant devenir enseignant de la conduite aura deux chemins différents pour y parvenir. Elle pourra soit s’inscrire dans un centre de formation agréé et suivre l’intégralité de la formation (CCP1 et CCP2). Dans ce cas, elle devra effectuer un stage en entreprise de 105 heures durant lesquelles elle sera placée sous la responsabilité d’un enseignant de la conduite et ne pourra être qu’observatrice. Soit, elle pourra opter pour une formation en alternance en signant un contrat de professionnalisation avec une auto-école. Dans ce cas, elle pourra dès l’obtention de son 1er CCP participer activement à l’activité de l’entreprise en donnant des cours en relation avec la thématique du 1er CCP obtenu. Et c’est là, une véritable révolution ! En effet, jusqu’à présent, les stagiaires ne pouvaient rien produire. Ils devaient se contenter d’être accompagné d’un tuteur. Ce qui constituait une charge pour l’auto-école et ne garantissait pas que la personne reste dans l’entreprise une fois sa formation achevée. D’où le peu de succès rencontré par cette formule. Selon Jean-Pierre Lemonnier, secrétaire général de l’UNIDEC, on ne compterait pas plus d’une centaine de contrats en alternance signés par an « et encore, les auto-écoles qui acceptent de prendre un stagiaire le font souvent parce que c’est un membre de leur famille ». La solution est donc venue tout dernièrement avec l’obtention de la légalisation de l’autorisation temporaire et restrictive d’enseigner (ATRE) ». Concrètement, dans le cadre de la loi de simplification, le CNPA et l’UNIDEC ont déposé un amendement permettant de changer le Code de la route. Adopté le 11 avril 2014, cet amendement modifie l’article L. 212-2 de la sorte : «Peuvent également exercer la fonction d’enseignement de la conduite automobile et de la sécurité routière, les personnes en cours de formation pour la préparation à l’un des titres ou diplômes d’enseignant de la conduite et de la sécurité routière, dans les conditions prévues par le décret en Conseil d’État ». Cette autorisation valable 2 ans permettrait ainsi aux jeunes en contrat de professionnalisation d’une part d’apprendre véritablement leur métier sur le tas, mais aussi de contribuer à la rentabilité financière de l’établissement. Un échange gagnant-gagnant. À noter que pour éviter toute dérive de la part de certains exploitants, la part d’ATRE par entreprise est limitée à 20% de l’effectif total des enseignants de la conduite.

La formation des formateurs
L’enseignement dans les centres de formation agréés sera dispensé par des professionnels uniquement issus du secteur de la formation à la conduite. Encore une fois, Alain Catala insiste sur l’importance pour la profession de prendre la main sur la branche. En d’autres termes, la formation sera dispensée par des BAFM. « C’est un point important, estime Michel Schipman. Nous tenions à ce que le BAFM soit conservé ». Ainsi, explique Alain Catala, les organisations professionnelles présenteront une liste des personnes qui souhaitent devenir formateur. Si ces dernières entrent dans le cadre défini par l’AFPA, elles auront à suivre une journée d’information au titre, à l’AFPA, et pourront ensuite enseigner. « Le BAFM pourra former à l’ensemble du programme, précise Michel Schipman, mais pourra également faire intervenir un enseignant d’une ancienneté de 3 ans formé pour des modules définis ou un formateur non enseignant pour des modules bien précis, par exemple, un assureur pourra intervenir sur la partie assurance, etc. » Les jurys d’examen seront composés exclusivement de formateurs. Mais bien évidemment, un formateur ne pourra faire passer l’examen à ses propres élèves. L’affectation des examens aux formateurs sera effectuée par la Direction régionale des entreprises, de la concurrence, de la consommation, du travail et de l’emploi (DIRRECTE). Et gros avantage, les examens pourront se dérouler toute l’année en fonction des besoins d’embauche de moniteurs par la profession.

Le calendrier de mise en application
« Tout est prêt ! Les textes sont en attente de signature », souligne Alain Catala. « Si le calendrier est respecté et que la loi est promulguée début 2015, les arrêtés et les décrets d’application pourront sortir pour spécifier les obligations concernant l’agrément des centres de formation, la qualification des intervenants, les programmes et leur durée. Ainsi, on devrait encore avoir une session de formation au Bepecaser, avant la disparition de ce dernier au profit du titre profession « Enseignant de la conduite et de la sécurité routière » en 2016. Cependant, pour éviter d’avoir une rupture du nombre de formateurs spécialisés moto et/ou groupe lourd, il devrait y avoir encore deux ou trois sessions pour les mentions moto et groupe lourd ». En effet, un titulaire de l’actuel Bepecaser « tronc commun » ne pourra se présenter aux formations spécifiques moto et poids lourd du titre professionnel. En d’autres termes, si vous êtes titulaire du Bepecaser « tronc commun » et envisagez de passer une spécialisation prochainement, mieux vaut vous dépêcher de passer votre spécialisation tant que c’est encore possible si vous ne voulez pas devoir passer l’intégralité du titre professionnel pour avoir accès aux spécialisations. Les enseignants titulaires du Bepecaser et des mentions « deux-roues » et/ou « groupe lourd » ayant obtenu leurs diplômes avant la disparition du Bepecaser et de ses mentions de spécialisation n’ayant évidemment pas besoin de repasser quoique ce soit.
Sandrine Ancel

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