Enquête CLCV : beaucoup de bruit pour rien

01/11/2019 Études/sondages
Études/sondages Enquête CLCV  : beaucoup de bruit pour rien

L’association de consommateurs CLCV a publié début septembre une enquête sur les tarifs des auto-écoles. Une information largement relayée par les médias et souvent présentée comme un document à charge contre la profession. Malheureusement, cette enquête ne fait en rien avancer le débat.

L’Association Consommation, Logement et Cadre de Vie (CLCV) est une association nationale, à but non lucratif, de défense des consommateurs et des usagers. Elle réalise des enquêtes sur différents sujets relatifs à la consommation et s’intéresse régulièrement à celui de la formation à la conduite. Ainsi d’avril à juillet 2019, la CLCV a relevé les tarifs de 665 écoles de conduite dans 45 départements de la Métropole.

Coût moyen de 20 heures : 1 079,15 euros
Premier constat : le coût moyen du forfait 20 heures relevé par les enquêteurs (bénévoles) de la CLCV, s’élève à 1 079,15 euros.
Sur ce point, force est de constater que ce tarif est très proche de ce que révèle L’Observatoire des prix du permis réalisé par La Tribune des Auto-Écoles qui interroge chaque mois cinq écoles de conduite dans six villes différentes. Ainsi, ce mois-ci, le coût moyen relevé était de 1 173,80 euros pour les villes d’Ajaccio, d’Épinal, de Marseille, de Quimper, de Tulle et de Valenciennes. Quant au mois dernier, il s’élevait à 1 073,30 euros pour les villes d’Angoulême, de Caen, de Chambéry, de Mulhouse, de Narbonne et de Sens.

Des disparités tarifaires d’une ville à l’autre
Deuxième constat : on observe des écarts importants du tarif du forfait 20 heures d’une ville à l’autre. La CLCV donne pour exemple le forfait le plus cher sur Paris à 1 700 euros et le moins cher sur Lille à 699 euros. Là encore, ce n’est en rien une surprise ! Et pour cause, le coût des charges diffère d’une ville à l’autre. On se doute bien que le coût d’un loyer commercial est plus élevé en plein centre de Paris que dans une ville de province. La CLCV indique : « Nous rappellerons que la formation au permis est définie au niveau national, une telle variation tarifaire des prestations selon les villes est assez inégalitaire pour les candidats ». On peut certes le regretter, mais dans ce cas, les écarts du coût de l’immobilier et de la vie en général sont également inégalitaires. De même, la CLCV constate et déplore que le prix d’une leçon de conduite peut varier du simple au double. Elle donne pour exemple, une leçon à 36 euros dans le Nord qui est facturée 70 euros dans certains établissements parisiens. Cependant, la CLCV précise : « Mais ces tarifs correspondent souvent à une durée de conduite effective différente ». Dans ce cas, comparons ce qui est comparable ! Au-delà des différences de charges en fonction de l’emplacement géographique évoqué précédemment, il semble logique qu’un cours de 45 minutes soit facturé moins cher qu’un cours d’une heure. Idem pour un cours collectif par rapport à une leçon particulière.

Une présentation biaisée par les médias
Si établir un observatoire du prix du permis de conduire n’est pas sans intérêt puisqu’il permet d’avoir rapidement une cartographie à un instant T, les résultats doivent être manipulés avec quelques précautions. Ce qui n’est malheureusement pas le cas de la plupart des médias grand public qui se contentent d’affirmer qu’il est plus intéressant de passer son permis dans telle ville car c’est deux fois moins cher que dans telle autre ville. Une comparaison uniquement basée sur le tarif qui ne prend notamment pas en compte le contenu et la qualité de la formation, et qui peut donner l’impression que certains établissements sont des voleurs !
On notera par ailleurs que la CLCV parle des auto-écoles en général et ne fait pas clairement la distinction avec les plateformes. Sur ce point, l’intersyndicale regroupant le CNPA-ER et l’UNIDEC-ASAV a tenu à préciser dans un communiqué de presse : « Il convient toutefois de souligner que si la confusion peut régner au niveau des offres, celle-ci est bien le fait de plateformes en ligne dont la pérennité financière repose sur la duperie des élèves : avec un prix d’appel qui s’élève certes à 800 euros, mais pour un prix du permis de conduire en main revenant en vérité à plus de 1 550 euros. De telles offres low-cost sont permises par un appauvrissement maximal de l’accompagnement pédagogique de l’élève et par une intense optimisation fiscale et sociale de la part de ces entreprises qui veulent se présenter comme des start-ups alors même qu’elles sont adossées à de grands financiers ».

Des taux de réussite très inégaux d’une région à l’autre
La CLCV constate également qu’il existe de fortes disparités d’une région à l’autre. En s’appuyant sur une carte régionale affichant les taux de réussite (source : ministère de l’Intérieur pour l’année 2017), la CLCV conclue : « Bien qu’il s’agisse d’un diplôme national, il semble donc statistiquement nettement préférable de passer l’épreuve pratique du permis B en Lozère (76,39 %) plutôt qu’à Paris (45,57 %) ! ». Encore une fois, c’est faire un raccourci un peu simpliste. On se doute bien que, même si l’examen est national et que les inspecteurs essaient de composer des parcours comportant un certain nombre de paramètres bien définis (feu rouge, panneau stop, créneau, etc.), la conduite à Paris est plus stressante et peut comporter plus de difficultés que dans certaines zones géographiques peu peuplées.

Un affichage des prix pas toujours respecté
Outre la question du prix et du taux de réussite, la CLCV constate que l’arrêté du 19 juin 1978 qui réglemente l’affichage intérieur et extérieur des tarifs d’une auto-école n’est pas toujours respecté. Ainsi, « l’affichage extérieur n’a pas du tout été relevé par nos enquêteurs dans 14 % des auto-écoles enquêtées ». Dans son communiqué de presse, l’intersyndicale déclare : « les professionnels de l’éducation routière ne peuvent que souscrire à l’objectif de transparence des tarifs proposés aux candidats et condamnent sans détour les cas de non-respect de la réglementation en vigueur. Nous rappelons par ailleurs avoir soutenu la mise en place d’un observatoire du permis de conduire, annoncé par le Premier ministre Édouard Philippe, en mai dernier ». Pour sa part Philippe Colombani, président de l’UNIC se fait plus sarcastique : « La CLCV nous dit que 14 % des écoles de conduite n’ont aucun affichage extérieur ! Eh bien, c’est génial, car cela signifie que 86 % des professionnels respectent la réglementation, ce qui fait un taux sacrément élevé d’écoles respectueuses. J’aimerais que cela soit pareil dans toutes les professions ».

Des demandes de la CLCV peu pertinentes
En conclusion de cette enquête, la CLCV énonce plusieurs requêtes. En premier lieu, elle réclame « des contrôles réguliers dans l’affichage des tarifs des auto-écoles et des sanctions en cas de manquement. Un affichage extérieur absent dans 14 % des auto-écoles enquêtées ou incomplet dans tiers des cas est inacceptable s’agissant d’une réglementation vieille de plus de 30 ans ». Notons que des contrôles sont déjà effectués dans les écoles de conduite ayant pignon sur rue, mais que c’est nettement moins le cas pour les plateformes et les moniteurs indépendants. La CLCV demande par ailleurs la création de contrats-type présentant le contenu du forfait 20 heures, ainsi que le taux de réussite à l’examen et le nombre d’heures moyen de leçons de conduite prises par les candidats avant présentation. Idem pour « le forfait 30 heures qui correspond en pratique à la durée moyenne pour l’obtention du permis par les Français » ainsi que l’accès aux informations indispensables pour choisir son auto-école. Sur ce point la DSR rappelle que la réforme du permis dévoilée en mai dernier, prévoit de « lancer un contrat-type et un comparateur en ligne, pour mieux comparer les offres des auto-écoles et pouvoir faire jouer la concurrence d’ici à fin 2019 ». Enfin, la CLCV souligne que « comme le préconise le rapport parlementaire de février 2019 Vers un permis de conduire accessible et une éducation routière renforcée, l’accessibilité du permis pourrait être renforcée par la baisse de la TVA, actuellement de 20 % ». Une mesure que réclament les écoles de conduite depuis des années ! Bref, si l’enquête de la CLCV a fait le buzz médiatique pendant 24 heures, elle n’a rien apporté de neuf. Sinon ternir une nouvelle fois l’image des écoles de conduite.

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