Examen Théorique : peut-on lutter contre la fraude ?
01/05/2019 Formations/ExamensLe nouvel examen théorique se voulait plus sécurisé. Pourtant, force est de constater que des petits malins ont trouvé le moyen de frauder. Existe-t-il des moyens pour lutter efficacement contre la triche ?
Le 27 mars 2017, un gérant d’auto-école du Val-de-Marne écopait de deux ans de prison ferme, sa femme et sa fille de deux ans d’emprisonnement avec sursis, et son gendre, un inspecteur du permis de conduire, d’un an avec sursis. Tous étaient impliqués dans une opération de triche à l’épreuve théorique générale qui aurait duré entre 2013 et 1015. Le système consistait à équiper les candidats d’un boîtier qui vibrait lorsque la bonne réponse apparaissait à l’écran, grâce à la complicité d’un comparse placé à l’extérieur de la salle d’examen et qui écoutait les questions grâce au téléphone portable des candidats. Cette escroquerie avait notamment fait grand bruit car le chanteur Kendji Girac, avait avoué avoir eu recours à ce système pour obtenir son examen du Code. Mais l’affaire du Val-de-Marne est loin d’être la seule condamnation de ce type. Outre le boîtier vibreur, d’autres systèmes de fraude avaient été développés avec une personne dans la salle d’examen indiquant plus ou moins discrètement avec les doigts, la réponse à la question, etc. Autant de combines qui fonctionnaient avant la mise en place du nouvel examen théorique général en 2016.
Un système plus sécurisé ?
En effet, en optant pour un examen individuel attribué de façon aléatoire à chaque candidat, l’État escomptait mieux sécuriser l’ETG. Difficile de continuer à appliquer les anciennes combines de triche et inutile de copier sur son voisin qui n’a désormais pas les mêmes questions. Mais c’était sans compter sur la capacité des escrocs à s’adapter aux nouvelles règles. En novembre 2018, cinq personnes étaient interpellées à Marseille, Nice, et La Seyne-sur-Mer. Elles étaient soupçonnées d’avoir mis en place un réseau de triche à l’examen théorique général pour permettre à des personnes ne sachant pas lire ou ne maîtrisant pas le français d’obtenir leur examen du Code de la route. Cette fois, le système de fraude faisait appel à la technique du look-alike. En d’autres termes, des personnes dont le visage ressemblait plus ou moins à celui du candidat étaient envoyées passer l’examen à la place de ce dernier qui obtenait le Code en échange d’une somme d’argent, sans s’être déplacé dans le centre d’examen.
Des fraudes assez facilement détectables
Interrogée, Agnès Kulifier, branche nouveaux services à La Poste, reconnaît avoir eu connaissance de « quelques cas de fraudes, malgré ce système d’examen plus sécurisé mis en place par l’État ». Un constat que partagent Roselyne Defer, directrice du Développement chez SGS et Florent Maret, directeur automotive France services aux gouvernements et commerce international chez Bureau Veritas, responsable de Code’n Go. « Mais on détecte assez facilement les centres où il y a de la triche, déclare ce dernier. Si vous avez un taux de réussite bien supérieur à la moyenne nationale, c’est suspect. Dans ce cas, on mène l’enquête et l’on n’hésite pas à fermer le centre d’examen quand on obtient la preuve de tricheries. Heureusement, ça arrive rarement, mais on a déjà fermé trois centres pour ce motif. Sur ce point, nous sommes intransigeants chez Bureau Veritas car c’est la réputation de Code’n Go qui est en jeu ».
Fermeture des centres suspects
De son côté, Emmanuel Barbe, reconnaît également être conscient du problème de la fraude et déclare qu’une enquête est en cour. Le délégué interministériel à la sécurité routière affirme notamment discuter régulièrement avec les sociétés privées chargées de l’organisation du passage de l’examen théorique de ce problème et demander la fermeture des centres suspects, « ce que font généralement les sociétés agréées ».
Quelle solution au problème ?
Mais comme dit le proverbe, « mieux vaut prévenir que guérir ». En d’autres termes, fermer les centres frauduleux est une chose, mais l’idéal serait de ne pas permettre aux tricheurs de commettre leurs escroqueries. Sur ce point, Roselyne Defer a peut-être une solution. « Les surveillants ont pour consignes de vérifier l’identité des candidats avant le passage de l’examen. Pour cela, ils se basent sur la carte d’identité de la personne présente. Or la carte d’identité est valable 10 ans pour les mineurs et maintenant 15 ans pour les personnes majeures. En quelques années, un jeune peut beaucoup changer physiquement et ce n’est pas toujours évident de savoir si la personne présente à l’examen correspond bien à celle dont le visage est sur la photo. C’est pourquoi chez SGS, nous demandons que l’ANTS nous communique une copie de la photo du dossier d’inscription du candidat. Cette dernière est censée être récente, donc plus ressemblante au candidat. Cela permettrait sans doute aux examinateurs de mieux détecter les éventuels fraudeurs. » Une piste à explorer…