Véhicule-école électrique : une vision d’avenir pour les écoles de conduite ?

01/04/2021 Automobile/Équipements
Automobile/Équipements Véhicule-école électrique : une vision d’avenir pour les écoles  de conduite ?

Les auto-écoles Electric conduite à Aix-les-Bains, en Savoie, et We are zéro, à Toulouse, en Haute-Garonne, ont choisi d’enseigner la conduite exclusivement sur des voitures automatiques électriques. Un concept qui attire les jeunes sensibles à l’écologie et qui présente certains avantages pour les écoles de conduite.

En Savoie, à Aix-les-Bains, le courant passe entre Anthony Darvey et sa Hyundai Ioniq ! Depuis septembre 2020, il enseigne la conduite à ses élèves uniquement avec ce véhicule automatique à motorisation électrique. « J’ai commencé à préparer ce projet il y a quelques années, lorsque j’ai su que le gouvernement allait changer la loi vis-à-vis du permis automatique en imposant 13 heures de formation au lieu de 20 ». Puis, l’exploitant de Electric Conduite a muri son projet lors du premier confinement l’an dernier, en faisant le choix non seulement d’un véhicule automatique, mais en plus doté d’un moteur électrique. « Il y a une prise de conscience écologique chez les jeunes. Ils viennent plus me voir car j’ai une voiture électrique plutôt qu’automatique car à leurs yeux, c’est le véhicule de l’avenir ». Au départ, son choix s’est porté sur une Tesla model 3. Mais le constructeur californien ne l’a pas autorisé à installer des doubles commandes. Aussi, il a revendu ce modèle et s’est orienté vers une Hyundai Ioniq automatique de 136 ch, dotée d’une batterie de 38 kWh et présentant une autonomie de 320 km.

De réelles économies de carburant et d’entretien du véhicule
« On sent qu’il y a un réel engouement pour ce type de motorisation qui, il faut le dire, présente de nombreux avantages », confie Anthony Darvey. En premier lieu sa souplesse. « Quand les élèves accélèrent, le couple est quasi instantané. Ce qui facilite les premières d’heures d’apprentissage. De plus, c’est un véhicule silencieux et confortable ». D’un point de vue financier, les avantages sont également intéressants pour l’auto-école. « Il n’y a quasiment pas d’entretien. Le changement des disques et des plaquettes est retardé grâce au freinage régénératif ». Enfin, le poste de carburant est très allégé. D’autant plus qu’à Aix-les-Bains, la collectivité, très impliquée dans la transition énergétique, lui permet de recharger son véhicule gratuitement. « Par rapport à un véhicule thermique classique, j’économise 4 000 euros par an, estime l’exploitant. Et si je payais l’électricité, cela me coûterait environ 800 euros par an ».

Mise en place d’une nouvelle pédagogie
Avec ce véhicule, Anthony Darvey a introduit de nouvelles notions dans sa pédagogie. Tout d’abord le freinage. « Le frein moteur est beaucoup plus présent sur un véhicule électrique. Il faut donc expliquer aux élèves la différence avec un véhicule thermique ». Globalement, le dirigeant constate que cette motorisation induit une conduite plus apaisée, moins rapide pour préserver l’autonomie de la voiture. à ce titre, il met l’accent sur les différents systèmes de rechargement. Au programme : les temps nécessaires selon qu’il s’agit d’une borne rapide ou lente. Et pour aller plus loin, il organise des voyages-école. Avec trois élèves, il part à la journée. L’objectif est de les familiariser à la conduite dans d’autres agglomérations (Lyon notamment), mais aussi sur autoroutes et voies rapides. Les élèves sont chargés de préparer leur itinéraire, identifier les stations de rechargement le long du parcours et calculer l’autonomie dont ils auront besoin. « Je leur démontre qu’un véhicule électrique n’empêche pas de voyager. Il suffit juste de prévoir des pauses d’une vingtaine de minutes pour recharger le véhicule. C’est l’occasion de s’arrêter toutes les deux heures pour se détendre. Ils comprennent parfaitement cette contrainte qui n’en est pas vraiment une. C’est une autre façon de se déplacer ».

Un coût de formation compétitif
La préparation au permis automatique sur un véhicule électrique offre aussi un avantage qui est loin d’être négligeable pour les élèves : celui du prix. Anthony Darvey propose un forfait à 689 euros en formule complète (inscription, préparation au Code et à l’examen pratique), avec une heure de conduite à 42 euros. Pour les formations ne portant que sur la pratique, l’auto-école a établi un prix à 675 euros. Avec environ 6 inscriptions par mois, Electric conduite affiche un taux de réussite de 82 %. « Lors de la formation, j’insiste sur le fait qu’ils peuvent ensuite obtenir le permis sur boîte manuelle au bout de trois mois après avoir suivi la formation de 7 heures en auto-école. Peu d’élèves le savent. Je leur conseille fortement de régulariser leur permis car si un jour leur voiture automatique tombe en panne, il se peut que le garage leur prête une voiture dotée d’une boîte manuelle ». Persuadé que la demande pour ces permis « écologiques » va augmenter, Anthony Darvey a commandé à nouveau une Tesla électrique et a enfin obtenu le feu vert du constructeur pour l’équiper de doubles commandes. « Elle circulera en mai ou juin 2021 », affirme-t-il. « Je garderai la Ioniq électrique en véhicule de secours. Et pour développer l’activité si c’est nécessaire, j’embaucherai un enseignant », indique plein d’optimisme Anthony Darvey.

Une auto-école éco-responsable à Toulouse
En Haute-Garonne, à Toulouse, William Lemaître – à la tête d’une quinzaine d’auto-écoles situées en Occitanie –, a ouvert le 15 mars 2021 sa première agence éco-responsable. Dans celle-ci, le permis automatique est enseigné avec quatre Mini Hatch électriques. Comme Anthony Darvey, il constate : « Les jeunes ont une conscience écologique que nous n’avons pas ou peu. Nous avons voulu répondre à cette attente qui ne cesse de grandir ». Pour mener à bien ce projet, William Lemaître a créé la start-up « We are zero ». Un statut qui lui a permis de lever des fonds auprès d’investisseurs privés. Il a donc acheté six Mini, dont deux seront affectées prochainement à de futures agences de Montpellier et Paris.

Une incitation à adopter une conduite apaisée
Lui aussi se félicite des avantages liés à la motorisation électrique. « Le silence est apaisant. De plus, grâce au système de récupération d’énergie, il y a une recherche permanente de conduite économique. Cela plaît beaucoup aux élèves », affirme-t-il. « C’est surtout un atout supplémentaire en termes de sécurité routière puisque cela incite à rouler moins vite, éviter les à-coups ». Autre intérêt qui, à l’instar de l’exploitant d’Electric Conduite, ne lui a pas échappé : une économie sur les coûts d’entretien. « Cela se résume à changer les pneumatiques et les essuie-glaces. Je ne sais absolument pas quand je devrais changer les plaquettes. On ne freine quasiment jamais car il suffit de lever le pied de l’accélérateur pour que le véhicule ralentisse ». Des caractéristiques techniques et mécaniques que l’enseignant de la conduite a également ajoutées à la formation de ses élèves. « Il faut bien leur expliquer l’utilisation et le fonctionnement du véhicule électrique, en particulier son autonomie et ses systèmes de rechargement. Pour cela, il existe plusieurs applications mobiles pour les accompagner. Les jeunes en sont friands car ils sont hyper connectés. »

Un permis zéro Co²
Face au prix d’achat des véhicules électrique (plus élevés que les thermiques), William Lemaître a sorti sa calculette : « avec les bonus de l’état, cumulés au fait que l’on ne paie pas de taxe sur les véhicules de société (TVS) et que le prix de l’énergie est très largement inférieur à celui du gazole, le calcul est vite fait ». William Lemaître a acheté ses véhicules en leasing sur une période de 60 mois. « Cela représente une mensualité de 600 euros TTC ». Mais il a poussé plus loin sa démarche d’éco-responsabilité. Pour réduire le prix du permis – il se targue de proposer la formation la moins chère de France avec une formule à 499 euros –, il a misé sur les simulateurs de conduite. L’agence de Toulouse en compte cinq. Un moyen de proposer un permis « totalement décarboné » qui vise à réduire l’impact de l’activité de l’entreprise sur l’environnement. Un moyen également pour réduire considérablement les coûts de fonctionnement. Son calcul est simple : « un enseignant s’occupe de cinq élèves sur simulateur. Cela change la donne en matière de masse salariale. Si la moitié de la formation se fait sur ces outils, le prix final du permis baisse considérablement ». Et le chef d’entreprise d’affirmer que « ce modèle économique est solide » puisque « nous arrivons à dégager des marges à deux chiffres ». Qui a dit que les écoles de conduite de proximité étaient engluées dans le passé ? 

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