Le permis AM en perte de vitesse

01/06/2017 Formations/Examens
Formations/Examens Le permis AM en perte de vitesse

Entre baisse de la demande et manque de rentabilité pour les auto-écoles, le permis AM, qui englobe les deux-roues et les quadricyles légers à moteur de 50 cm3 maximum, peine à s’imposer.

Entré en vigueur le 19 janvier 2013, dans le cadre de la réforme du permis moto, le permis AM a substitué le BSR pour les deux-roues de 50 cm3 maximum et les quadricyles légers à moteur qui ne dépassent pas, comme pour les cyclomoteurs, la vitesse de 45 km/h. Accessible dès l’âge de 14 ans, il s’adresse aux jeunes nés à partir de 1988, les autres pouvant s’en affranchir, selon la législation. Lors de sa mise en place, le permis AM a conservé en grande partie le programme du BSR, tout en y incluant des modifications. La formation pratique, accessible en cas de validation de l’ASSR1, de l’ASSR2 ou de l’ASR, a été allongée, passant de 5 à 7 heures. Elle fait ensuite l’objet d’une attestation, délivrée par l’auto-école à la préfecture, qui décerne ensuite le permis au candidat. S’il a connu une embellie entre 2013 et 2014, passant de 102 500 à 122 956 titres délivrés à l’échelle nationale, selon les chiffres communiqués par la DSCR, le permis AM s’est ensuite stabilisé en 2015, avec 122 413 titres délivrés, avant de subir une nette décrue en 2016 (111 913). Au-delà du repli, ces chiffres soulignent la confidentialité de cette catégorie. À titre de comparaison, 847 036 candidats ont été reçus à l’examen du permis B en 2015, soit 724 623 de plus que pour le permis AM.

Des aspérités géographiques
Bruno Garancher, président d’ECF, le concède : « Le volume de permis AM délivrés est faible ». Pour lui, la situation est particulièrement marquante dans les zones urbaines, où il note « une désaffection, que ce soit pour le permis AM ou pour le permis B. Nous sommes dans le creux de la vague. On enregistre un fort recul des inscriptions, notamment concernant la population qui approche les 18 ans. Les jeunes se posent plus tardivement la question du permis de conduire. Ils attendent d’entrer dans la vie active ou d’avoir une vie familiale. » En revanche, le permis AM semble se maintenir dans les zones rurales, qui, contrairement aux pôles urbains, ne sont pas toujours dotées de réseaux conséquents de transports en commun. « Il existe, dans ces territoires, une vraie appétence des jeunes pour le transport individuel, et ce dès l’âge de 14 ans », constate Bruno Garancher. Alain Martin, référent pour le permis AM au CNPA, tient le même discours. À la tête de la moto-école Zebra, située à Paris, il reconnaît « que la demande est très faible en Île-de-France ». Mais en province, dit-il, le permis AM « offre une liberté de mouvement. Il est un élément fort de la vie sociale ».

Le deux-roues freiné par son image
Les critères géographiques n’expliquent pas à eux seuls l’état actuel du marché de la catégorie AM. Le deux-roues, par exemple, peine à rencontrer son public chez les plus jeunes, en raison, principalement, de son image écornée. « Nos formations attirent essentiellement des personnes âgées de plus de 18 ans, souligne Pascal Augé, référent pour le permis AM chez CER et responsable de l’auto-école Bobillot, à Paris. Des parents ne souhaitent pas, pour des raisons de sécurité, que leurs enfants se dirigent vers le deux-roues. » Alain Martin, dans le même registre, déplore que « l’accidentologie nuise à l’univers du deux-roues. Il existe autour de la pratique une communication négative, que les constructeurs n’essaient pas de corriger. Il faudrait développer un produit qui puisse déjouer cette réputation, en accompagnant sa commercialisation avec un discours adapté. »

Le quadricycle encore confidentiel
Le quadricyle léger à moteur, même s’il est en capacité d’offrir plus de garanties en matière de sécurité, semble encore souffrir d’un déficit de notoriété. Bien que les données de la DSCR ne distinguent pas les deux déclinaisons de la catégorie AM, ne pouvant ainsi permettre d’évaluer leur ampleur, Bruno Garancher constate que « le marché est en croissance dans des zones géographiques précises, mais, dans l’ensemble, il reste quasi-nul ». Pour lui, la formation à la conduite de la voiture sans permis reste « émergente. Elle s’adresse surtout à une population aisée en mesure d’acquérir le véhicule ». Pascal Augé souligne également les contraintes matérielles. « Pour des raisons pratiques, les auto-écoles demandent bien souvent que l’élève fournisse le véhicule, ce qui représente un investissement important pour les parents ». Il rappelle toutefois que des établissements affiliés à des réseaux peuvent profiter de prêts de la part de constructeurs partenaires.

« Une bonne entrée en matière »
La formation à la pratique du quadricycle a pris un nouvel élan en 2014, lorsqu’une réforme a abaissé l’âge légal à 14 ans, au lieu des 16 ans auparavant. « Cette mesure a ouvert le marché », note Bruno Garancher, qui en souligne les bienfaits sur l’apprentissage de la conduite. « C’est une très bonne entrée en matière. L’élève aura déjà accumulé des compétences et de l’expérience quand il souhaitera évoluer sur une autre catégorie de permis. » Aujourd’hui, selon de nombreux professionnels, la formation au permis AM est peu intéressante économiquement pour une auto-école. « Ça ne vaut pas le coup de se lancer », lâche Alain Martin. « Le parc de scooters n’est pas rentabilisé », note pour sa part Pascal Augé. Sans parler des tarifs, « qui vont vers le bas, comme pour l’ensemble des formations. Chacun essaie de survivre comme il peut ». Dans ces conditions, note Bruno Garancher, « il faut privilégier le collectif pour les parties de la formation qui le permettent. Sinon, il faut s’appuyer sur d’autre sources de revenus ».

« Le marché ne peut être que stable »
L’intérêt pour les auto-écoles de développer une offre de formation pour le permis AM semble résider essentiellement dans la possibilité de proposer un produit d’appel, qui puisse permettre de fidéliser la clientèle. « On le fait pour être en mesure de répondre à la demande. L’activité, si elle n’est pas rentable, peut permettre à l’élève de prendre connaissance de notre offre et éventuellement de revenir dans notre auto-école pour se former », estime Pascal Augé. Quant à l’avenir de cette catégorie, les professionnels ne semblent pas attendre de bouleversements. « Je ne pense pas que le permis AM va repartir à la hausse, indique Bruno Garancher. Même si le quadricyle s’impose comme une alternative, je doute qu’il va concerner plus de jeunes. D’autant que pour les titulaires du permis B, la passerelle vers le permis AM est autorisée. Ce marché ne peut donc être que stable », conclut-il. 

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