Handicap mental ou cognitif : passer le permis, un parcours du combattant

01/04/2015 Réglementation
Réglementation Handicap mental ou cognitif : passer le permis, un parcours du combattant Apprendre à conduire pour des personnes atteintes d’un handicap mental peut vite tourner au parcours du combattant. Mais avec un zeste de volonté et beaucoup de patience, tout est possible !

Certains élèves « lambda » ont besoin de 40 ou 50 heures de conduite pour obtenir leur permis. Et sont obligés de passer l’examen plusieurs fois, voire même parfois d’abandonner. On imagine donc facilement la galère que peut représenter cet apprentissage pour un public handicapé, mental ou cognitif. Pourtant, à force de volonté et de persévérance, ces jeunes conducteurs arrivent parfois à leurs fins !

Visite médicale auprès d’un médecin agréé
Pour qu’une personne atteinte d’un handicap mental, quel qu’il soit (cela vaut aussi pour les handicaps physiques), puisse s’inscrire dans une auto-école et être « autorisée » à apprendre la conduite, plusieurs étapes doivent être respectées. Il faut impérativement qu’un avis médical soit donné sur l’aptitude du futur conducteur à rouler seul au volant d’un véhicule. Cet avis peut être délivré soit par un médecin agréé auprès de la préfecture, soit par une commission spéciale. Le futur conducteur doit également passer des tests psychotechniques, pour s’assurer de ses capacités cognitives. « Il n’y a pas de règle et chaque cas est différent, explique un médecin agréé auprès de la préfecture de Paris pour les visites médicales du permis. On peut éventuellement assister à une leçon de conduite pour voir les capacités d’analyse du futur conducteur sur la route. » La visite est remboursée pour les personnes invalides à plus de 50%.Mais comme souvent, l’argent est le nerf de la guerre. Un test psychotechnique coûte plus de 100 euros, facturé à l’élève handicapé. Sans compter, s’il est déclaré apte, la facture totale des heures de conduite, souvent très salée vu le nombre de leçons nécessaires. Sans garantie de résultat…

Aucun handicap « exclu » du permis
« Aucun handicap n’est exclu d’office, cela dépend des capacités de la personne », insiste le médecin parisien. L’arrêté du 21 décembre 2005 fixe la liste des affections médicales incompatibles avec l’obtention du permis de conduire. Il est précisé que le permis ne « peut être délivré à tous candidats […] atteints d’une affection susceptible d’entraîner une capacité fonctionnelle de nature à compromettre la sécurité routière ». Mais pour les déficiences mentales majeures comme pour les troubles cognitifs et psychiques, c’est l’avis médical qui tranchera. Si certains handicaps peuvent paraître plus « lourds » que d’autres, ils ne sont donc pas forcément rédhibitoires. Il y a quelques années d’ailleurs, Pauline, une jeune trisomique particulièrement vive et autonome, était passée dans l’émission de télé Tellement vrai, sur NRJ 12. Elle avait passé son permis avec succès. Christine Malignon, gérante de l’auto-école CER provençale, à Digne-les-Bains (Alpes-de-Haute-Provence), a accompagné un jeune handicapé mental désireux de passer son permis de conduire. « Il présentait des troubles cognitifs, et je dois avouer que quand il est arrivé pour s’inscrire à l’auto-école, j’ai eu peur que ce soit trop compliqué pour lui. Il me disait qu’il faisait du ski, que la conduite ne devait pas être beaucoup plus compliquée, mais c’est quand même très différent ! », raconte-t-elle. Le jeune homme travaillait dans un CAT (centre d’aide par le travail), et souhaitait pouvoir être plus autonome. Il aurait pu choisir un permis sur boîte automatique, certes plus restrictif mais aussi plus accessible. Mais l’établissement n’en proposait pas, et le jeune avait visiblement à cœur de réussir un permis « classique ».

96 heures de conduite
Voyant qu’il était motivé et bien entouré par ses parents, Christine a accepté de se lancer. « Je lui ai fait signer un papier précisant qu’il lui faudrait beaucoup, beaucoup d’heures pour passer son examen. Je voyais que pour ses parents, l’argent n’était pas un problème et il a aussi pu faire une AAC. Mais il lui fallait beaucoup de travail et de persévérance. » Finalement, l’enseignante de la conduite a passé 96 leçons avec lui, à répéter les mêmes situations. « Le relationnel est vraiment très important, il faut beaucoup de patience des deux côtés », renchérit la monitrice. Et le jeune conducteur a fini par obtenir son permis du premier coup, « avec un examinateur très sévère », renchérit Christine Malignon. Aujourd’hui, son ancien élève est chauffeur livreur dans une blanchisserie. Non seulement son papier rose lui permet d’être plus autonome, mais il lui a en plus assuré un emploi. Fière de la réussite de son protégé, Christine constate qu’il a franchi tous les obstacles de ce « parcours du combattant »

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